" La minute management et coaching #293 " Manager : qu'est-ce que vous possédez et qu'est-ce qui vous possède ?

Dans le monde managérial, beaucoup opèrent sous l'idée que le pouvoir, la hiérarchie, la reconnaissance, les résultats sont des possessions. On croit posséder ses compétences, ses collaborateurs, ses objectifs, ses méthodes. Et pourtant, ce que l'on possède finit par vous posséder : vos méthodes finissent par vous diriger, vos objectifs sont devenus des tyrans, votre image de manager se mue en carapace rigide.

Ce que le manager possède vraiment

On peut identifier plusieurs types de " possession " que le manager peut revendiquer ou exercer.

Possession matérielle et structurelle

• Le budget, les ressources humaines, technologiques et financières.

• Le pouvoir hiérarchique : pouvoir de décision, d'embauche, d'attribution des récompenses ou des sanctions.

Possession symbolique et culturelle

• Le prestige, le titre, la reconnaissance.

• L'influence sur le style, la culture de l'équipe, les valeurs, les normes implicites.

• Le droit à sa parole, être écouté, être crédible.

Possession de soi-même : les compétences et la posture

• Son savoir, ses savoir-faire (techniques, stratégiques, opérationnels).

• Ses softskills : communication, empathie, capacité à déléguer, à motiver.

• Son identité de manager : le modèle, l'idéal que l'on cherche à incarner.

Possession du temps et de l'espace mental

• Le temps : priorités fixées, agenda, ce que l'on décide de faire ou de déléguer.

• L'espace mental : la clarté de ses pensées, la capacité à choisir ses engagements et à dire non.

Ce qui possède un manager et les forces qui le déterminent

En parallèle, de multiples structures internes et externes " possèdent " le manager, au sens où elles le déterminent, le limitent ou le transforment.

Les objectifs organisationnels, les indicateurs

• KPI, objectifs de performance, délais, productivité : ce sont des cadrages externes qui peuvent dominer la vie professionnelle du manager.

• La pression des résultats financiers, de la concurrence, de la rentabilité.

  
  

La culture d'entreprise, les normes sociales

• Ce que l'on attend du manager dans un secteur donné, par exemple, être " toujours disponible ", optimiser chaque ressource, supprimer les coûts, etc.

• Le style de management valorisé ou sanctionné ( autoritaire, collaboratif, agile, hiérachique ) : souvent ce que la direction, les pairs ou l'histoire de l'entreprise imposent.

  
  

L'image de soi et le regard des autres

• L'ego: la peur de ne pas être pris au sérieux, de perdre son statut, d'être perçu comme faible.

• Le besoin de reconnaissance : des collaborateurs, de la hiérarchie, des pairs.

• La comparaison: ce que les autres managers font, ce que l'on " devrait " faire.

  
  

Le temps et les urgences

• Les crises, les urgences, les réclamations imprévues dont le manager est le point de convergence.

• L'agenda imposé : réunions, reporting, tâches administratives, etc.

  
  

Les limites psychologiques

• Fatigue, stress, peur de l'échec, perfectionnisme.

• Biais cognitifs, zone de confort, résistance au changement.

Le conflit entre ce qu'on possède et ce qui nous possède

C'est dans la tension entre ces possédants et ces possédés que se joue la qualité du leadership, la durabilité, le bien-être du manager et de ses équipes.

• Quand les possessions se retournent contre le possesseur : des compétences non remises en question deviennent rigides. Un objectif quantitatif prend le pas sur la qualité, l'éthique. Le pouvoir hiérachique use, isole, transforme.

  
  

• Quand on est possédé : on devient esclave de ses meetings, de ses indicateurs, de son image, de ses peurs. On perd de vue le sens initial du management : accompagner, développer, inspirer.

Quelles stratégies pour conserver la liberté du manager ?

Prendre conscience des identités imposées vs authentiques

• Se poser la question : "Qu'est-ce que j'ai laissé faire parce que c'est attendu, non parce que je le veux ?".

• Travailler sur les valeurs personnelles : quels principes refusent de céder, quels compromis sont acceptables et lesquels ne le sont pas.

  
  

Choisir ses possessions: ce à quoi on dit oui, ce à quoi on dit non

• Définir ses priorités personnelles et professionnelles.

• Déléguer ce qui n'est pas essentiel.

• Mettre des limites sur le temps, les heures, les urgences.

  
  

Mettre l'objectif au service du sens

• Ne pas simplement viser les KPI, mais se demander : " Pourquoi cet objectif ? Quel impact ? Pour qui ?

• Encourager la réflexion colective sur les indicateurs eux-mêmes, est-ce que ce que l'on mesure est ce qui compte vraiment ?

  
  

Se donner des marges de respirations

• Moments de recul : feedbacks, mentorat, supervision, coaching.

• Pratiques de mindfulness, méditation ou simplement pause réflexive pour évaluer ce qui est en train de vous posséder.

  
  

Cultiver l'imperfection et la flexibilité

• Accepter l'erreur, l'incertitude.

• Ne pas chercher à tout contrôler.

  
  

Développer la conscience systémique

• Comprendre que vous bivouaquez dans un système plus large : culture d'entreprise, ressources limitées, interactions humaines, exigences externes.

• Relier votre action managériale à ce système : comment collaborer, influencer, transformer.

Quelles implications et pistes de transformation ?

• Pour les organisations / entreprises : former non seulement aux compétences techniques, mais à la conscience de soi, à la posture, pour aider les managers à identifier ce qui les possède. Encourager une culture où les indicateurs servent le sens et non le contraire.

  
  

• Pour les managers eux-mêmes : pratiquer l'auto-réflexion, recueillir du feedback, non pas juste sur ce que vous accomplissez, mais sur comment vous vivez votre rôle; vos possessions et vos possessions subies.

En fin de compte, le management véritable exige un équilibre constant entre ce que vous pouvez posséder et ce que, sans vigilance, finit par vous posséder. Le défi est de rester " possesseur libre ", autrement dit : propriétaire de ses choix, de son énergie, de son attention.

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